09/24/2025 | Press release | Distributed by Public on 09/24/2025 14:05
À Windsor, en Ontario, théâtre de la grève historique qui a mené à l'adoption de la formule Rand, Unifor a tenu à souligner le 80e anniversaire de la grève de 1945 à Ford, un moment marquant qui a changé pour toujours le droit canadien du travail et inspiré des générations de travailleuses et travailleurs. La présidente nationale d'Unifor Lana Payne s'est jointe à des membres, des retraitées et retraités ainsi qu'à des chefs de file de la collectivité pour honorer cet héritage et réaffirmer l'importance de la lutte pour l'équité, la justice et la solidarité.
Allocution de Lana Payne :
Bonsoir et solidarité à vous tous et toutes.
Je suis ravie d'être ici et de me joindre à vous pour célébrer une lutte et une victoire monumentales pour notre syndicat et l'ensemble du mouvement syndical canadien.
Permettez-moi d'abord de remercier John et la section locale 200 pour leur aimable invitation à me joindre à vous à Windsor. Merci d'avoir organisé cette célébration exceptionnelle pour marquer le 80e anniversaire de l'une des grèves les plus importantes, sinon la plus importante, de l'histoire du mouvement syndical canadien : la grève générale de Windsor.
Cette grève en faveur de la sécurité syndicale a changé le cours de notre mouvement syndical au pays, une grève qui a rejeté catégoriquement cette idée du « droit au travail » et qui a plutôt propulsé le mouvement syndical canadien vers une position de force, de résistance et de pouvoir.
C'est donc ici même, à Windsor et à la section locale 200, qu'est née la sécurité syndicale pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs canadiens, c'est-à-dire notre capacité de mettre en commun nos ressources et d'utiliser le pouvoir de nos cotisations collectives pour lutter contre les entreprises et les gouvernements et défendre nos intérêts tout en œuvrant en faveur du progrès.
Au cours des 80 dernières années, les employeurs et la classe politique ont tenté à maintes reprises de faire marche arrière quant aux gains obtenus lors de cette grève historique de 1945 des travailleuses et travailleurs de Ford au Canada. Mais notre syndicat et le mouvement syndical ont continué de défendre vigoureusement la sécurité syndicale. Nous nous sommes battus pour protéger le principe selon lequel toute personne qui bénéficie d'une convention collective doit payer des cotisations syndicales.
Nous avons vaincu des adversaires politiques comme Tim Hudak et d'autres encore qui ont tenté de faire adopter ces lois antisyndicales et défavorables aux travailleuses et travailleurs dans notre propre pays.
Mais comme vous le savez, ce n'est pas le temps de tenir pour acquis des droits aussi importants. Nous devons rester vigilants et rejeter toute complaisance à chaque tournant du mouvement syndical.
En 1945, Ford était le plus grand employeur au Canada. La section locale 200 était la plus grande du pays, et la section locale 195 arrivait au deuxième rang.
Lorsque les travailleuses et travailleurs de la section locale 200 à Ford ont fait la grève pendant cinq semaines, la section locale 195 a pris la relève en faisant preuve d'une grande solidarité. Des milliers de membres de la section locale 195 à GM, à Chrysler et dans diverses usines de pièces de Windsor ont fermé leurs propres usines pour rejoindre la section locale 200 sur la ligne de piquetage, sans indemnité de grève, pendant près d'un mois.
Imaginez la scène : des travailleuses et travailleurs qui renoncent à leur salaire pendant un mois pour aider des collègues à obtenir le droit de prélever leurs cotisations syndicales sur leur salaire.
Imaginez à quel point ce combat serait difficile aujourd'hui dans le contexte actuel.
Et pourtant, ensemble, les 11 000 membres de la section locale 200 et des milliers de travailleuses et travailleurs de plus de 25 milieux de travail différents ont formé le célèbre barrage routier devant l'usine de Ford.
Comble de l'ironie, les travailleuses et travailleurs utilisaient les produits mêmes qu'ils avaient construits de leurs propres mains comme instrument de résistance et de militantisme contre leur employeur et un État répressif.
Personne ne sera étonné d'apprendre que Windsor est la ville prosyndicale par excellence au Canada. C'est dans l'air. Et c'est certainement dans son ADN.
Le soutien passionné de la communauté de Windsor, du maire aux églises locales, en passant par les petites entreprises et les autres groupes de travailleuses et travailleurs, a sans doute été le point de départ de cette solidarité organique mutuelle exceptionnelle qui caractérise la communauté de Windsor. Elle perdure aujourd'hui grâce à vous tous et toutes, dirigeantes et dirigeants de sections locales et alliés militants.
Comme vous le savez, l'entreprise a ultimement accepté une proposition visant à soumettre le conflit à l'arbitrage exécutoire et la question de la sécurité syndicale a été confiée au juge Ivan Rand.
Six semaines après le retour au travail des membres à Ford, le juge Rand a rendu sa décision : il a instauré le prélèvement des cotisations syndicales dans la convention collective, déclarant que tous les travailleurs et travailleuses d'un milieu de travail qui bénéficient d'une représentation syndicale devraient verser des cotisations. Pas de resquilleurs.
Ce gain, l'un des premiers, démontre que ce qui se passe à la table de négociation et dans les conventions collectives dans le secteur automobile profite à d'autres dans l'ensemble de l'économie industrielle. (C'est un peu comme ce qui s'est produit en 2023 après la conclusion d'accords historiques dans le secteur de l'automobile lorsque d'autres travailleuses et travailleurs ont été inspirés à se battre pour obtenir des salaires et des avantages sociaux similaires.)
À la fin de 1946, seulement 12 mois après le blocus, 23 accords à Windsor avaient intégré avec succès la formule Rand, notamment à Chrysler. GM a accepté à contrecœur l'année suivante, en 1947.
Ultimement, la formule Rand a été intégrée dans la législation, au bénéfice de tous les membres syndiqués, au Québec dans les années 1970 et en Ontario dans les années 1980, inspirée par une autre grève historique menée par nos consœurs de Fleck Manufacturing en 1978 qui, face à la répression de l'État et à la violence policière, ont défendu avec acharnement les travailleuses de tout le pays, exigeant la sécurité syndicale dans leur convention collective. Elles ont ensuite obtenu gain de cause en faisant intégrer la formule Rand dans la loi.
Notre syndicat s'est révélé être à l'avant-garde de la montée du mouvement syndical canadien grâce à son courage et à sa détermination.
Windsor illustre parfaitement ce courage, un gage de la façon dont nous renforçons le pouvoir des travailleuses et travailleurs et dont nous pouvons surmonter les difficultés qui se présentent à nous, quelles qu'elles soient. Nous le faisons ensemble, et parfois, nous devons riposter de manière radicale.
Alors que nous sommes réunis ici aujourd'hui, les difficultés auxquelles nous sommes confrontés sont différentes, mais tout aussi importantes que celles auxquelles nous avons fait face il y a 80 ans. Le secteur automobile et manufacturier canadien est en plein cœur d'une guerre commerciale déclenchée par le président des États-Unis, Donald Trump. Le gagne-pain de milliers de travailleuses et travailleurs est en jeu. C'est grâce à notre remarquable syndicat, celui auquel nous appartenons, que nous aimons et que nous finançons collectivement, que nous pouvons riposter, que nous pouvons résister et que nous pouvons lutter pour un monde favorable aux travailleuses et travailleurs.
Face à ces difficultés, rappelons-nous toujours l'esprit combatif, le courage et la détermination de ceux et celles qui ont lutté en première ligne en 1945.
Soyons prêts à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger les emplois au Canada, protéger les travailleuses et travailleurs canadiens, et combattre farouchement en faveur de nos droits, et en revendiquer de nouveaux, en faisant preuve de tout autant de férocité, de courage et de détermination que ceux et celles qui nous ont précédés.
Lorsque nous sommes unis, nous gagnons.
Solidarité, confrères et consœurs. Et merci pour votre militantisme syndical et de continuer à bâtir notre syndicat.