10/20/2025 | Press release | Archived content
Le président de la République d'Arménie, Vahagn Khatchatourian, a prononcé le discours d'ouverture de la conférence de deux jours intitulée Forum international sur la connaissance : l'Arménie, ville universitaire.
Zhanna Andreasyan, ministre de l'Éducation, des Sciences, de la Culture et des Sports de l'Arménie, et Givi Mikanadze, ministre de l'Éducation, des Sciences et de la Jeunesse de Géorgie, ont également prononcé des discours d'ouverture.
Le discours du président :
« Chers participants à la conférence,
Tout d'abord, je tiens à souhaiter la bienvenue à tous les participants à la conférence Forum international sur la connaissance : l'Arménie, ville universitaire.
Le titre même de la conférence suggère que l'objectif principal des discussions à venir est d'examiner les défis mondiaux et les développements innovants qui émergent dans les domaines de l'enseignement supérieur et des sciences, ainsi que de présenter la vision stratégique de l'Arménie pour renforcer son rôle dans le domaine de l'éducation et de la recherche internationales.
Mes remarques porteront brièvement sur les lauréats du prix Nobel d'économie de cette année. La raison est simple : premièrement, parce que le prix a été décerné à des scientifiques qui ont apporté une contribution exceptionnelle à la théorie économique, à savoir aux théoriciens de ce que l'on appelle la « destruction créatrice » ; et deuxièmement, parce qu'il est directement lié au progrès technologique et au lien entre la connaissance et l'éducation.
Le prix Nobel d'économie 2025 a été décerné à trois économistes dont les travaux incarnent l'idée de « destruction créatrice », introduite pour la première fois dans les années 1940 par Joseph Schumpeter. Joel Mokyr, Philippe Aghion et Peter Howitt ont élargi notre compréhension de la manière dont le progrès technologique contribue au développement humain et à l'amélioration du niveau de vie. Comme l'a décrit Schumpeter, « toute innovation technologique a deux facettes : elle détruit, rendant les anciennes méthodes obsolètes, et elle crée, inondant le marché de nouveaux produits et de moyens plus efficaces de répondre aux besoins humains ».
L'accent mis par le Comité Nobel sur la destruction créatrice est particulièrement pertinent aujourd'hui, à une époque dominée par les craintes liées à l'intelligence artificielle. Les débats publics soulignent souvent le côté destructeur de l'IA : les emplois qu'elle pourrait supprimer ou les industries qu'elle pourrait transformer au point de les rendre méconnaissables. On accorde beaucoup moins d'attention à son côté créatif : l'émergence de nouveaux produits et services, l'efficacité qui rendra certains problèmes économiquement viables pour la première fois, et les opportunités qui se présenteront lorsque les ressources seront libérées d'anciennes utilisations moins efficaces.
Je suis convaincu que tout au long des discussions, la Ville universitaire sera naturellement au centre de l'attention de nombreux participants. Dans ce contexte, je voudrais rappeler les réflexions de Joel Mokyr, l'un des lauréats du prix Nobel de cette année et historien de l'économie : « Les changements économiques dépendent, plus que ne le pensent la plupart des économistes, de ce que les gens croient. » Les croyances et le discours, ainsi que la transformation matérielle, constituent la pièce manquante du puzzle de la croissance économique moderne.
Pour Mokyr, un innovateur est une sorte de rebelle, quelqu'un qui refuse d'accepter le monde tel qu'il est et qui est déterminé à le remodeler. Les économies prospères s'appuient sur l'innovation comme moteur, mais l'innovation elle-même dépend d'un environnement institutionnel qui accueille favorablement cette rébellion créative. Sans ouverture à l'expérimentation et à la dissidence, même les esprits les plus talentueux manqueront d'espace pour transformer leurs idées en progrès.
Par ailleurs, Aghion et Howitt ont été les pionniers de ce que les macroéconomistes appellent la théorie de la croissance endogène.
Contrairement aux modèles antérieurs qui considéraient la croissance comme étant le résultat de forces externes telles que l'accumulation de capital ou des chocs technologiques aléatoires, Aghion et Howitt ont exploré la manière dont l'innovation naît au sein même du système. Pour eux, le potentiel technologique est niché dans le tissu institutionnel de chaque société, à l'image d'un poussin se développant à l'intérieur d'un œuf. Les économies évoluent ou stagnent en fonction de leur capacité à encourager ou à réprimer la destruction créatrice.
Selon les lauréats de cette année, la croissance durable n'est pas seulement une question d'investissement ou de dépenses de recherche. Elle nécessite une ouverture au changement technologique et la volonté d'accepter l'instabilité qu'il entraîne.
Les gouvernements doivent résister à la tentation de céder à leurs luddites internes. Les luddites étaient des membres du mouvement des ouvriers textiles anglais du XIXe siècle qui s'opposaient à certaines formes de mécanisation par crainte pour les salaires et la qualité des produits. Ils détruisaient souvent des machines lors de raids organisés. Ces ouvriers se sont donné le nom de luddites en référence au légendaire tisserand Ned Ludd, dont le nom était utilisé dans des lettres de menace adressées aux propriétaires d'usines et aux responsables.
Une réglementation excessive et des politiques de favoritisme peuvent étouffer l'expérimentation entrepreneuriale, entraver les investissements et, en fin de compte, étouffer la créativité. Il est tout aussi essentiel de limiter l'influence des intérêts particuliers qui cherchent à se protéger de la concurrence. Lorsque les entreprises établies dictent l'agenda politique, elles le font souvent au détriment des innovateurs qui pourraient un jour les remplacer.
Une fois encore, je tiens à souligner que le prix Nobel de cette année est un hommage rare et bien mérité à ceux qui ont approfondi notre compréhension de la dynamique de l'innovation, des institutions et de la destruction créatrice. En leur rendant hommage, le comité a rappelé au monde que le progrès économique ne dépend pas de l'évitement du changement, mais de son exploitation.
Et c'est précisément cette philosophie qui doit nous guider dans les années à venir, en particulier lorsque nous cherchons à résoudre des défis stratégiques et à faire face à des difficultés dans le domaine de l'éducation.
L'éducation, la connaissance, la destruction créatrice et les nouvelles technologies sont les moteurs qui garantiront le développement continu de la République d'Arménie, le bien-être de ses citoyens, la croissance de son économie et le renforcement de sa sécurité nationale.
Je vous souhaite à tous un travail fructueux. »
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