09/18/2025 | News release | Distributed by Public on 09/18/2025 13:25
Un des modules de l'exposition illustre les systèmes de reconnaissance faciale assistés de l'IA, et leur pendant éthique, le droit à la vie privée. Ici, le personnage se rend à son travail sans se douter qu'il est filmé à cinq reprises par des caméras de sécurité.
- Université Laval, Méline Haudry
À l'heure de l'IA. C'est là le titre de la toute nouvelle exposition présentée à compter du jeudi 18 septembre jusqu'au 27 octobre prochain, au niveau 00 de la Bibliothèque de l'Université. Mise sur pied par l'Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'IA et du numérique (OBVIA), un réseau de recherche interuniversitaire regroupant près de 300 chercheuses et chercheurs, cette exposition interactive propose des perspectives diversifiées pour stimuler une réflexion nuancée sur les possibilités et bénéfices de l'intelligence artificielle (IA) avec ses risques.
«Nous souhaitons offrir un espace de réflexion sur l'utilisation et l'impact des technologies dans nos vies quotidiennes, à questionner notre relation avec le numérique», explique le directeur scientifique de la recherche de l'OBVIA et professeur à l'École de psychologie de l'Université Laval, Philip Jackson.
Selon lui, l'IA a chaque jour un impact un peu plus important sur nous. «Les gens, poursuit-il, ont tendance à voir l'IA comme très poussée, comme très loin, alors que nous sommes tous des utilisateurs sans le vouloir. Ça nous est parfois suggéré, parfois imposé. Le but de l'exposition est de faire connaître les avantages de cette technologie, peut-être ses limites et de ne pas avoir peur de questionner ce qui se fait dans son déploiement, et de se questionner nous-mêmes. Est-ce que ça comble un besoin, est-ce qu'on a besoin de tout ça, est-ce que ça crée de nouveaux besoins?»
L'exposition s'appuie sur huit stations, soit autant de scènes de la vie quotidienne. Ces modules débutent avec le lever à 7h du matin et se poursuivent jusqu'au coucher le soir. À chaque endroit, un personnage entre en contact, de façon consciente et volontaire ou non, avec une technologie intégrant de l'intelligence artificielle. Chaque module suit la même trame narrative: l'heure, l'action, la technologie, les enjeux et le principe éthique. Des femmes et des hommes sont ainsi présentés dans différents contextes. Huit technologies sont abordées. Ce sont les systèmes de recommandation musicale, les systèmes de reconnaissance faciale, les assistants «intelligents» pour centres d'appels, les systèmes de détection du cancer, les systèmes générateurs d'hypertrucages, les systèmes générateurs de textes, les systèmes de recherche de contenus et les systèmes de recommandation de contenus culturels.
Chacun des modules aborde un grand principe éthique incontournable. Dans l'ordre, il y a la responsabilité, le droit à la vie privée, l'autonomie, le bien-être et l'équité, la prudence et l'imputabilité, la transparence, le développement durable et l'inclusion de la diversité.
Selon le professeur Jackson, faire corriger les fautes d'orthographe par l'IA est une chose. «Lui faire composer un paragraphe, ce n'est pas la même chose, soutient-il. Il faut être conscient qu'on délègue une responsabilité.»
Julie Goulet-Kennedy est coordonnatrice de l'exposition et conseillère en mobilisation et transfert des connaissances à l'OBVIA. Selon elle, l'élaboration des contenus ne fut pas chose facile.
«Quelles connaissances choisir et mettre de l'avant a représenté un grand défi, souligne-t-elle. Il a fallu trouver le moyen de rendre l'information accessible à monsieur et madame Tout-le-Monde. Et comment intéresser le visiteur? On a essayé plusieurs trames narratives. On a finalement choisi de suivre plusieurs personnages, le tout sur une journée. Un autre défi a consisté à choisir les exemples de technologies utilisant l'IA. Quels enjeux voulions-nous soulever? Plusieurs axes de recherche sont représentés, comme la santé et la sobriété numérique. L'exposition contient des éléments d'interactivité. Comme on ne pouvait pas tout dire, des codes QR permettent aux curieux, à certains moments, d'approfondir leur réflexion.»
Julie Goulet-Kennedy, coordonnatrice de l'exposition, et Philip Jackson, directeur scientifique de la recherche de l'OBVIA, devant le module consacré aux systèmes générateurs de textes assistés de l'IA.
- Université Laval, Méline Haudry
Selon la coordonnatrice, les chercheuses et chercheurs de l'OBVIA reçoivent en ce moment beaucoup de questions relatives à la sobriété numérique. «Les gens veulent savoir ce que représente sur le plan énergétique une recherche sur Copilot ou ChatGPT, explique-t-elle. On entend aussi beaucoup parler des centres de données et de leur grosse consommation d'énergie.»
L'exposition À l'heure de l'IA consacre un module à l'aspect environnemental de l'intelligence artificielle. On peut y lire que créer une recette de cuisine avec un système d'IA générative dégage 10 à 60 fois plus de CO2 que la recherche d'une recette déjà existante sur le Web.
Autre exemple: le module 4 consacré à la santé et à l'analyse de radiographies. Selon Philip Jackson, oui, l'IA aide à détecter un cancer. En cela, elle est meilleure qu'un humain seul. Et oui, le cancer sera traité plus rapidement. «Mais, demande-t-il, comment la santé publique voit-elle les choses? Est-ce qu'il existe des moyens de prévention du cancer? L'IA sert à régler un problème et le fait bien. Mais n'y a-t-il pas des moyens pour éviter ça, comme la promotion de la santé, de l'exercice physique, de la saine alimentation?»
Vu l'évolution rapide de la technologie, qu'en sera-t-il de l'IA dans 10 ans? «Cette technologie sera différente de celle d'aujourd'hui», répond le professeur Philip Jackson. Il rappelle que d'éminents chercheurs en développement technologique soulèvent des dangers potentiels à venir en matière d'IA. «C'est sûr qu'il y a des possibilités, affirme-t-il. Mais l'objectif de l'exposition est de se poser des questions toujours. L'IA est-elle utile? Est-ce qu'on a le plein contrôle de ce qui se passe? Est-ce qu'on s'en sert comme un outil, ou est-ce qu'on délègue des questions de responsabilité?» Selon lui, l'humain a un rôle à jouer dans l'évolution de la technologie. «Est-ce qu'on laisse se réaliser les scénarios catastrophiques qui disent que les outils vont décider pour nous? poursuit-il. Nous avons beaucoup de poids aujourd'hui sur ce que nos outils font. À nous de décider.»
Pour Cathia Bergeron, vice-rectrice aux études et aux affaires étudiantes, responsable de la santé, cette exposition «donne le coup d'envoi à notre année de la littératie en intelligence artificielle. Tout au long de 2025-2026, nous offrirons aussi à la communauté universitaire des conférences, des ateliers, des capsules vidéo et un outil d'autodiagnostic des compétences pour favoriser un usage éthique de l'IA. Ces différents moyens permettront de mieux comprendre les possibilités, les limites et les risques de cette technologie.»
Eugénie Brouillet, vice-rectrice à la recherche, à la création et à l'innovation à l'Université Laval, renchérit. «À travers cette exposition, dit-elle, on voit toute la force d'une recherche qui ne reste pas confinée à l'Université, mais qui va à la rencontre de la société. Vulgariser des savoirs complexes, stimuler la réflexion collective, créer un espace de dialogue: c'est aussi cela, mobiliser les connaissances.»
Cette exposition a reçu l'appui du Fonds de recherche du Québec et de la Faculté des sciences sociales de l'Université Laval. Itinérante, elle sera présentée sur tout le territoire québécois. Les organisations qui le souhaitent peuvent en faire la demande en écrivant à [email protected].
Un exemple d'interaction avec le module consacré aux systèmes générateurs d'hypertrucages assistés par l'IA.
- Université Laval, Méline Haudry