10/08/2025 | Press release | Distributed by Public on 10/08/2025 07:46
Alors qu'ils couvraient l'opération humanitaire de la Flottille Sumud, plusieurs journalistes ont été enfermés dans les geôles israéliennes après l'arraisonnement illégal des bateaux en route vers Gaza. Auprès de Reporters sans frontières (RSF), deux d'entre eux témoignent des maltraitances subies, contraires au droit international. RSF condamne fermement ces détentions et les violences infligées aux reporters par les autorités israéliennes.
"L'arrestation des journalistes présents sur la flottille constituait déjà une violation flagrante au droit à l'information. Mais les maltraitances, voire les violences qu'ils ont subies sont inacceptables. Alors que l'armée israélienne a déjà tué plus de 210 journalistes à Gaza, les autorités continuent à entraver la liberté de la presse et s'en prennent aux journalistes internationaux, déjà interdits d'entrer dans l'enclave. RSF appelle à leur protection ainsi qu'à celle des journalistes palestiniens et réitère sa demande d'ouvrir la bande de Gaza à la presse étrangère.
"À notre arrivée au port d'Ashdod, une violence inouïe s'est abattue sur nous", résume à RSF le journaliste du quotidien L'Humanité Émilien Urbach,de retour en France ce lundi 6 octobre, après quatre jours dans la prison israélienne de Ketziot dans le désert du Néguev. Alors qu'il vient d'être arrêté par les autorités israéliennes et amené à terre, le journaliste essaie de montrer sa carte de presse et se présente comme journaliste. "Je m'en fous", rétorque un soldat en jetant le document à terre. Le ton est donné.
Entre le 1er et le 3 octobre, les autorités israéliennes ont procédé à l'arraisonnement, illégal, de l'ensemble des bateaux de la flottille humanitaire Sumud, qui naviguait vers Gaza, initiative couverte par au moins une vingtaine de journalistes internationaux, selon les informations obtenues par RSF. Ces derniers ont été, comme l'ensemble des équipages d'environ 500 personnes, menottés et enfermés par l'armée israélienne.
Le collectif de défense des droits humains Adalah, en charge de leur défense, a dénoncé le fait que de nombreuses personnes ont comparu sans leur avocat. De plus, selon les témoignages de plusieurs personnes récemment libérées, tous ont été privés d'eau et de nourriture suffisante ainsi que de leurs médicaments, parfois vitaux. "Ils nous ont pris mes affaires, mes médicaments et mes appareils, refusant de les rendre. La fouille a été extrêmement humiliante : ils ont jeté mes affaires à la poubelle en me disant que je les retrouverais en prison, mais je n'ai rien récupéré", témoigne Lotfi Hajji,directeur de la section tunisienne du média qatarien Al Jazeera, qui a été privé de son traitement médicamenteux pendant plusieurs jours, jusqu'à sa libération le 4 octobre.
Un emprisonnement illégal et inhumain
Après leur arrestation illégale en mer, les participants de la flottille sont amenés vers le port d'Ashdod. Ils sont alors mis à genoux, la tête au sol pendant plusieurs heures. Émilien Urbach décrit les soldats israéliens procédant à des "humiliations gratuites", en plaquant à terre plusieurs personnes. Par la suite, tout l'équipage est "dévalisé" avant d'être placés, yeux bandés, dans un véhicule à la climatisation glaciale. D'autres, au contraire, ont été placés dans des bus surchauffés. "Une forme de torture", décrit Émilen Urbach.
Ils sont amenés le lendemain à Kteziot, une prison de haute sécurité, dans le désert de Néguev, à 150 kilomètres des côtes où ils ont été interpellés. Là-bas, enfermés à au moins dix par cellule dans une chaleur étouffante, les prisonniers ont été privés de leurs droits les plus élémentaires. "Nous devions boire l'eau du robinet des toilettes, de l'eau infectée par des matières fécales", dénonce le journaliste palestino-britannique Kieran Andrieu dans une interview au média Sky News.
"Deux repas en quatre jours, aucun temps de promenade, pas de coup de fil - tout ça sans cadre légal", rappelle Émilien Urbach. Dans sa cellule, il compte huit lits pour 15 prisonniers. Pendant la nuit, les gardes allument la lumière pour les empêcher de dormir ; et à deux reprises, un garde les menace en passant le canon de son arme à travers les grilles.
Pire encore, certains journalistes, comme plusieurs membres de l'équipage, auraient été frappés par les soldats israéliens. Selon le militant marocain Ayoub Habraoui, son compagnon de cellule, le photojournaliste tunisien Yassine Gaidi, a été "frappé au visage à plusieurs reprises" et "ses mains ont été piétinées". "Nous avons appris que Yassine a été particulièrement ciblé par les agressions lors de sa détention illégale, à travers les témoignages de ses codétenus libérés samedi. Nous avons passé environ 24 heures sans nouvelles de lui. Les avocats cherchant à lui rendre visite ont attendu plus de dix heures à la prison de haute sécurité de Ketziot", témoigne Thameur Mekki,le rédacteur en chef du média Rachma, avec lequel Yassine Gaidi collabore.
Le photojournaliste tunisien a finalement été libéré ce mardi 7 octobre, et envoyé vers la Jordanie. "Nous sommes soulagés suite à sa libération et le lancement des procédures de rapatriement. Il doit effectuer des consultations médicales immédiates. Il est temps de mettre fin aux crimes commis par l'armée de l'occupation israélienne contre les journalistes et à l'impunité du gouvernement génocidaire de Netanyahu",continue Thameur Mekki.
Le 8 juin, les autorités israéliennes avaient déjà arrêté illégalementdeux journalistes, Omar Faiad de la chaîne qatarienne Al-Jazeeraet Yanis Mhamdi du site français d'information Blast, à bord de la flottille Madleen. Libérés sous conditions, le premier avait été retenu plus de 24 heureset le second huit jours.