Élections en Moldavie : face à la désinformation russe, RSF appelle les futurs députés à protéger l’espace informationnel

La Moldavie organise dimanche 28 septembre des élections législatives cruciales pour son avenir européen. Mais cette échéance démocratique est gravement menacée par une vaste offensive de désinformation orchestrée depuis Moscou. Plusieurs enquêtes - d'un journaliste infiltré de la BBC News Russian, du journal d'investigation moldave Ziarul de Gardaou encore du média en ligne indépendant NordNews.md, ont révélé les dessous de cette campagne de propagande. Des centaines de trolls, recrutés viaTelegram, seraient rémunérés en cryptomonnaie par des réseaux liés à l'oligarque en fuite Ilan Shor - lui-même sanctionné par les États-Unis et l'Union européenne - pour publier de fausses informations visant à discréditer la présidente Maia Sandu et son parti pro-européen. Parmi les intox diffusées : de prétendues fraudes électorales en préparation, ou encore des accusations délirantes liant l'adhésion à l'Union européenne (UE) à une "conversion forcée" de la société moldave aux valeurs LGBTQI+.

En parallèle, la police moldave a perquisitionné le 16 septembre les chaînes de télévision Primul în Moldovaet Canal 5, suspectées de blanchiment d'argent et de financement occulte au service de la propagande pro-russe. Selon les autorités, ces médias font partie d'un réseau structuré visant à influencer illégalement le scrutin.

Faux sondages pro-russes publiés en ligne, campagnes coordonnées de trolls diffusant des vidéos manipulatrices sur TikTok - dont certaines cumulent déjà plus de 20 millions de vues dans un pays de seulement 2,4 millions d'habitants -, réseaux financés viades banques russes sanctionnées… Ces méthodes rappellent celles utilisées par le Kremlin lors d'autres scrutins récents, qu'il s'agisse des tentatives d'ingérence lors de l'élection présidentielle en Moldaviel'an dernier, de celle en Roumaniequi a poussé la Cour constitutionnelle à annuler le scrutin en décembre 2024, celles dans les Balkanspour stopper globalement les processus d'adhésion à l'UE, ou encore lors de l'élection présidentielle de 2024 aux États-Unis.

Si certaines plateformes comme TikTok ont supprimé plus de 100 000 faux comptesen deux mois, l'écosystème informationnel reste saturé de contenus manipulés, et les journalistes enquêtant sur ces opérations subissent de lourdes pressions.

Les recommandations de RSF

RSF appelle les futurs parlementaires moldaves à faire de la protection de l'espace informationnel une priorité nationale et propose les mesures suivantes.

• Imposer aux plus grandes plateformes numériques une obligation de promouvoir les sources fiables d'informationidentifiées comme telles par le biais de mécanismes d'auto-régulation indépendants à l'instar de la norme Journalism Trust Initiative (JTI)développée par RSF.
  
  
• Coopérer étroitement avec l'Union européenneafin, d'une part, d'aligner le droit moldave avec la législation européenne existante - notamment le Règlement européen sur la liberté des médias (EMFA) - dans le cadre du processus d'adhésion et, d'autre part, de soutenir l'adoption de sanctions visant les personnes qui mettent en œuvre des actions compromettant la souveraineté démocratique du pays.
  
  
• Soutenir la production d'informations fiablesen adoptant des mesures qui améliorent la soutenabilité économique des médias moldaves, sous réserve de la démonstration de leur indépendance par rapport à toute ingérence étrangère.