UNOG - United Nations Office at Geneva

09/30/2025 | News release | Distributed by Public on 09/30/2025 11:20

RDC : l'envoyée de l'ONU dénonce le gouffre entre l’arène diplomatique et le terrain

La République démocratique du Congo s'enfonce dans la tourmente. Dans les provinces orientales du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l'Ituri, la prolifération des groupes armés alimente un cycle sans fin de violences. Les affrontements se multiplient, les massacres se répètent et les civils restent pris au piège. Depuis juin, plus d'un millier de personnes ont été tuées dans les violences.

C'est le constat implacable dressé, mardi à New York, par Bintou Keïta, cheffe de la MONUSCO, la mission de paix de l'ONU déployée dans le pays. « La paix en République démocratique du Congo demeure encore largement une promesse », a-t-elle résumé devant le Conseil de sécurité, dénonçant « l'écart persistant » entre les annonces diplomatiques et la réalité sur le terrain.

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Un conflit enraciné dans l'Est riche en minerais

La RDC, géant d'Afrique centrale, recèle certaines des plus grandes réserves mondiales de cobalt, d'or et de coltan. Cette richesse est aussi une malédiction : elle attise depuis des décennies la convoitise de groupes armés et de puissances voisines, dont le Rwanda, accusé de soutenir militairement le Mouvement du 23 mars (M23).

Formé à l'origine de combattants tutsi congolais, le M23 est actif dans la région depuis plusieurs années. Depuis le mois de janvier, à la faveur d'une offensive éclair, le groupe rebelle a conquis de vastes zones du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, dont Goma et Bukavu, les deux principales villes de l'est du pays. Au sein de la coalition politico-militaire de l'Alliance Fleuve Congo (AFC), il a mis en place sur les territoires sous son contrôle une administration parallèle, remplaçant l'État congolais.

Washington et Doha, des négociations inabouties

Sur le front diplomatique, un accord avait été signé en juin à Washington entre la RDC et le Rwanda, sous l'égide des États-Unis et du Qatar, afin d'amorcer une désescalade.

À Doha, des discussions distinctes ont abouti en juillet à une déclaration de principe entre Kinshasa, la capitale congolaise, et le M23. Mais sept mois après l'adoption par le Conseil de sécurité d'une résolution exigeant le retrait du M23 de Goma et Bukavu, « les dispositions essentielles demeurent largement inappliquées », a déploré Mme Keïta.

Multiplication des groupes armés

Le M23 n'est qu'une partie du problème. En Ituri comme au Nord-Kivu, les Forces démocratiques alliées (ADF), d'origine ougandaise et liées à l'État islamique, multiplient les massacres, ciblant « les offices religieux et les funérailles ». Plus de 300 civils ont été tués au cours des trois derniers mois.

D'autres milices ensanglantent en Ituri : la CODECO, issue de la communauté Lendu, multiplie les attaques contre les Hema, tandis que le groupe Zaire, d'obédience Hema, multiplie les représailles. La Convention pour la révolution populaire (CRP), elle, affronte régulièrement l'armée régulière de Kinshasa. « Les civils, malheureusement, sont pris au piège », a insisté Mme Keita. À Gina, une localité de l'Ituri, 3.500 personnes se sont réfugiées en une seule nuit dans la base de la MONUSCO après des affrontements entre la CRP et les forces congolaises.

Au Sud-Kivu, dont la MONUSCO s'est retirée en 2024, les violations graves persistent. Outre les exactions du M23 sur les territoires désormais sous son contrôle, les Wazalendo - des groupes d'autodéfense alliés au gouvernement congolais - continuent selon l'émissaire de l'ONU « d'agir en toute impunité ».

© UNICEF/Jospin Benekire
Le camp de Shari à Bunia, en Ituri, dans l'est de la RDC, offre un abri aux familles qui ont fui la violence des groupes armés.

Une mission onusienne entravée

Déployée depuis 1999, la MONUSCO compte aujourd'hui plus de 9.000 soldats de la paix, mais son action est de plus en plus entravée par des contraintes financières. Les rotations de contingents sont bloquées, les approvisionnements en carburant et en nourriture retardés, et l'aéroport de Goma demeure fermé. « Sans ces conditions, la MONUSCO ne peut assurer pleinement le mandat de protection confié par ce Conseil », a prévenu sa dirigeante.

Cette paralysie se double d'une crise humanitaire de grande ampleur. Plus de 27 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire, dont près de six millions rien qu'en Ituri et au Nord-Kivu. La nouvelle épidémie d'Ebola dans le Kasaï, une région centrale du pays, accentue encore la détresse, alors que le plan humanitaire de l'ONU en RDC n'est financé qu'à hauteur de 15 %.

Face au décalage croissant entre les résolutions adoptées à New York et la réalité du terrain, Bintou Keïta a lancé un avertissement direct aux membres du Conseil : « Les nombreux écarts que j'ai décrits aujourd'hui affectent directement la population. Les combler n'est pas une option : c'est la seule voie pour sauver des vies et donner une chance à la paix ».

UNOG - United Nations Office at Geneva published this content on September 30, 2025, and is solely responsible for the information contained herein. Distributed via Public Technologies (PUBT), unedited and unaltered, on September 30, 2025 at 17:20 UTC. If you believe the information included in the content is inaccurate or outdated and requires editing or removal, please contact us at [email protected]